Comment encourager les comportements préventifs au travail?
Avec l’arrivée des nouvelles générations sur le marché du travail, on assiste à de nombreux changements sur le plan de la gestion. Il faut maintenant s’intéresser à l’expérience des employés et les motiver en santé et sécurité du travail (SST). Dans le cadre de sa conférence intitulée Reconnaissance au travail et SST : comment encourager les comportements préventifs, Jean-Pierre Brun, expert-conseil chez Empreinte Humaine et professeur retraité de l’Université Laval, a donné quelques trucs pour faire de la prévention un sujet positif qui donne envie de s’engager.
Selon une enquête réalisée par M. Brun en 2015, recevoir de la reconnaissance informelle, telle que des gestes d’appréciation, des paroles ou une rétroaction sur le travail réalisé, motiverait 98,6 % des gens sondés. Aussi, pour 98 % d’entre eux, la reconnaissance collective est plus importante que la reconnaissance individuelle. Ils ne veulent pas nécessairement être reconnus individuellement avec des prix, par exemple, mais ils désirent obtenir une reconnaissance collective de l’équipe, du métier et des groupes. « En management, si vous avez des gens à soigner, des camions à réparer, etc., il y a des objectifs déterminés. On sait qu’un bon levier de réussite, c’est la reconnaissance au travail. En SST, on a aussi des objectifs, qui peuvent être de n’avoir aucun accident, mais il y a bien autre chose. On doit par exemple s’assurer que les enquêtes sont faites, que le comité est efficace, etc. Est-ce qu’on sait comment motiver les employés à agir de manière sécuritaire? », se questionne Jean-Pierre Brun. « Nous avons plutôt une pratique de gestion structurée, plus classique, qui découle de règles et de directives. Au lieu de miser seulement sur la conformité des règles, il faut aussi viser à motiver les travailleurs à agir de manière préventive. Mais, pour que les employés y adhèrent, il nous faut des pratiques plus engageantes », ajoute-t-il.
Pas d’accident : des apprentissages à faire!
« Ce n’est pas parce qu’il n’y a pas d’événement accidentel dans votre entreprise qu’il n’y a rien à apprendre, au contraire! On sous-exploite les moments où il ne se passe rien », s’exclame Jean-Pierre Brun. Il mentionne qu’en SST, on essaie toujours d’apprendre des accidents qui se sont produits, pour ne pas les répéter, mais qu’il y a d’autres facteurs dont on peut aussi tenir compte. « Dans une année, il y a beaucoup plus d’heures travaillées sans accident. Et ces heures sont souvent dans l’angle mort. Ça permet aussi de faire de la SST une bonne nouvelle. Aujourd’hui, malheureusement, la santé et la sécurité du travail est plutôt perçue comme une mauvaise nouvelle », se désole M. Brun. « Nous avons plusieurs outils mis en place lorsqu’un accident survient, mais quels sont les outils qui nous permettent de comprendre pourquoi il n’y a pas eu d’accident dans une journée? Quels outils en matière d’apprentissage organisationnel nous aident à comprendre pourquoi nous avons passé une journée sans accident? », ajoute M. Brun. C’est pour cela qu’il croit qu’il faut valoriser la SST, démontrer qu’il est possible d’en parler de façon positive. Plus on valorise les bons comportements, plus il y aura un effet direct sur la SST.
Mais comment faire? Selon lui, la recette gagnante consisterait à mettre en place une reconnaissance des savoir-faire de prudence. Tous les jours, il faut comprendre pourquoi des travaux à risque ont été effectués et qu’aucun accident n’en a découlé. « C’est beaucoup plus que le respect des règles et des méthodes, c’est aussi de la patience, de la vigilance, de l’attention. C’est de prendre le temps de planifier, de coordonner, de prendre conscience de ce qui se trouve autour de soi pendant les travaux », ajoute-t-il.
La reconnaissance sous plusieurs formes
Un gestionnaire peut démontrer de la reconnaissance à l’égard de ses employés de diverses façons. Il y a premièrement la reconnaissance existentielle, lorsqu’un travailleur est apprécié pour ses qualités humaines, comme son désir de s’impliquer en SST, de transmettre son savoir-faire, son souci des autres et son optimisme. Pour l’encourager, il est alors possible de lui confier un projet en SST, de lui donner un rôle au sein de l’équipe, de l’encourager directement par des paroles et de répondre rapidement à ses demandes de formation, par exemple.
Deuxièmement, lorsqu’on parle d’objectifs fixés et atteints, il s’agit de reconnaissance de résultats (zéro accident, nombre de jours sans accident, taux de fréquence, taux de gravité, etc.). Pour souligner ces réussites, M. Brun donne quelques idées : repas avec la direction, choix par l’équipe des formes de reconnaissance, affectation du budget à une association, définition des lignes rouges en équipe.
« Il ne s’agit pas de faire la danse du soleil chaque fois qu’il y a une bonne pratique de prévention, mais c’est important de le souligner et de faire savoir aux employés qu’on l’a remarqué », mentionne Jean-Pierre Brun. Reconnaître les bons coups en SST, tous les jours, permettra d’instaurer un climat de confiance entre travailleurs et employeurs, de permettre une expression libre sur les risques, d’avoir de véritables leviers de motivation, en plus d’éviter le silence organisationnel.
Les critères de qualité de la reconnaissance
- La sincérité
Authentique et empreinte de franchise - La réactivité
Après l’acte, le résultat ou le comportement - La proximité hiérarchique
Exprimée par un supérieur - La variabilité
Des pratiques de reconnaissance - La personnalisation
Adaptée aux caractéristiques et aux valeurs de l’individu - La spécificité
Formulée en fonction d’une réalisation ou d’un effort spécifique - La cohérence
Liens avec les objectifs et les priorités de l’organisation